Ce samedi 13 mai 2017 était pour nous l’occasion de retrouver Cisco Herzhaft et Déborah Drouy, les organisateurs du « Blues and Beers » festival.
Nous avions eu la chance d’assister à la première en 2016 sur le domaine de la Bloomerie à Mouscron. Nous avions écrit un article et été particulièrement conquis par la rencontre avec Cisco Herzhaft, un homme humble, qui consacre sa vie à cette passion intense qu’est le blues. Il en connait l’histoire, tous les détails, ses concerts ne ressemblent à aucun autre, et au détour des répertoires, il raconte ses anecdotes et détails qui vous transportent outre atlantique.
Pour l’édition 2017, ils ont modifié l’organisation et le lieu de ce rendez-vous, transporté cette année à Froyennes-Tournai ,à « La petite Fabriek« . Nous avons été conquis par ce lieu, et Déborah nous a de suite accueillis chaleureusement, en nous faisant visiter le moindre recoin. La petite Fabriek est un lieu où se produisent régulièrement de nombreux groupes, mais aussi un gite avec chambres ou roulottes, noyées dans un écrin de verdure. L’établissement permet d’avoir accès à un bar, petite restauration, et une salle de concert pouvant accueillir 150-200 personnes environ.
La salle de concert est une immense grange rénovée, avec une très grande hauteur de plafond et une petite mezzanine surplombant la salle et la scène.
Dès notre arrivée, bien en avance comme toujours, nous nous sommes installés en mezzanine, afin d’assister aux balances. Cet exercice technique a été mené par une jeune femme, Éléonore, avec beaucoup de professionnalisme, répondant à la moindre exigence de chacun des musiciens.
Déborah et Cisco étaient partagés entre l’organisation, et pour Cisco sa participation au concert, exercice difficile qui démontre son total engagement dans ce festival.
Les balances terminées, vers 19h00, le public a commencé à arriver, et comme l’année passée, il s’agissait pour beaucoup de fin connaisseurs du registre blues… certains d’entre eux étaient de vrais passionnés.
Le premier concert : Geneviève Dartevelle ( Harmoniciste), Tom Dewulf (batteur) et Cisco en personne. Intrigués par un trio sans basse, nous avions hâte de les écouter.
Geneviève Dartevelle n’est pas une inconnue puisque d’abord amateur de Blues, elle pratique l’harmonica diatonique. Son style est apparenté au Roots, néanmoins elle aborde aussi les styles un peu plus jazzy, comme le « swing jump blues » et le « chicago blues ». Elle a participé dans les années 90 à des Masterclass avec T.Crommen et JJ.Milteau et reste néanmoins de formation autodidacte. Elle a puisé son inspiration au travers des différents groupes dans lesquels elle a collaboré . Il est bon de souligner qu’elle est probablement la première et seule femme harmoniciste de Belgique. Elle a joué avec le groupe Double Dose, de 1997 à 2000 et enregistré un CD » Have the double Dose you like ». Actuellement elle joue avec les » 4 noisy neighbours« , « les Excellos« , et un tribute de Neil Young « About Neil« .
Concernant le batteur Tom Dewulf, nous l’avions découvert l’année dernière avec Fernant Zeste; Il nous avait déjà particulièrement étonné. Ce batteur gantois est aussi une référence dans le milieu du jazz belge.
Notre à priori sur l’absence de basse a vite été balayé , tant ce trio vous emmène dans une rythmique impeccable, sous l’impulsion de Tom Dewulf et les chorus endiablés de Geneviève et Cisco; Cisco osant même introduire des mesures de « Caravan », grand standard de jazz, au beau milieu du titre « Baby Please don’t go« . Le public a été immédiatement entraîné vers un voyage qui le projetait déjà de l’autre coté de l’atlantique. Nous profiterons de la fin du set pour aller saluer Geneviève et lui transmettre les amitiés de son ex partenaire de scène de Double Dose, le bassiste Luc Dewerte.
Petite pause pour le changement de plateau sur scène, avec un bar à disposition et une petite restauration. 20 minutes plus tard, le second concert se mettait en place avec Steve Clayton.
Pendant l’intermède, nous avons capturé ce « gentil grizzly » et échangé avec lui quelques instants, tantôt en anglais, puisqu’il est originaire de Birmingham, tantôt en allemand, l’Allemagne étant sa patrie d’adoption depuis 20 ans ! Steve Clayton est né en 1962 et s’intéresse à la musique dès l’age de 10 ans. Son père lui achète un piano et déclenche chez lui le virus. Alors qu’il venait de terminer sa 5ème année de piano, son professeur lui compose un blues qu’il doit étudier. Ces rythmes et sons sont une révélation pour le jeune Steve qui ne connaissait jusqu’alors que le classique.Il développe une addiction, dépense tout son argent de poche pour acheter des disques de Cow cow Davenport, Albert Ammons, et de Memphis Slim. Il renonce définitivement au classique. Steve joue désormais dans plusieurs groupes de blues, y complète sa formation. Il sera rapidement surnommé « The big man of boogie woogie« . Très vite , il est demandé par des musiciens légendaires comme Louisiana Red, Schuggy Otis, et Carey Bell pour les tournées en Europe. Il participe à de nombreux CD, et on peut l’entendre sur le CD « He knows the blues » d’Otis Grand , récompensé d’un prix du jazz. Son travail au piano l’amène à chanter et écrire ses propre compositions. Son premier CD, « Can’t stop the Boogie », est enregistré en 1991. Il fera ensuite 7 enregistrements et a été nommé meilleur pianiste en Angleterre par le « British blues connection » dans les années 95-96-98. Il s’installe à ce moment la dans le sud de l’Allemagne, où il y est immédiatement remarqué. Il reçoit en 2001 le prix « Kupferle » de la région du sud de l’Allemagne, et en 2015 le prix « German Boogie Woogie award pinetops ».
Steve va nous offrir un show détonnant , impossible de rester en place , dès les premiers accords, cet homme vous envoûte et met le feu , emmenant ses musiciens et le public dans des diableries dont lui seul a le secret. Steve nous a indiqué qu’il aurait largement préféré jouer sur un vrai piano et non sur un keyboard, et on peut largement le comprendre quand on voit la débauche d’énergie qu’il met à l’ouvrage! Ce concert se termine, avec beaucoup de regret nous concernant.
A peine remis de nos émotions, nous avons 20 minutes pour aller à la rencontre de Little Mike, bluesman américain, qui pour l’occasion sera entouré des « French tornadoes » , un clin d’œil au groupe qu’il avait formé aux USA en 1978, alors qu’il avait 22 ans. Little Mike est un joueur d’harmonica et chanteur qui a emergé dans les années 70 à New-York, auprès de bluesmen tels Pinetop Perkins, Hubert Sumlin, et Jimmy Rodgers. Il a ensuite déménagé pour la Floride et a continué à se produire et enregistré jusqu’en l’an 2000. A l’époque des Tornadoes, chaque fois qu’un artiste de Blues venait à New-York, il était sollicité. La discographie de Little Mike est vaste et remonte au début des années 80 avec Elrob Records. De 1988 à 1996, il a enregistré avec Blind Pig Records.Il a participé à de nombreux enregistrements de musiques de films, de publicité, en 2013, il enregistre l’album « Forgive me ». En 2014, la critique acclamera » All the rights move ». De 2014 à 2016, il sera en tournée aux USA et en Europe du Sud.
Ce dernier concert a été également d’un très haut niveau. Nous avons passé avec cette seconde édition, de nouveau un très bon moment musical, grâce à Déborah et Cisco, en souhaitant qu’une saison 3 ait lieu et que le public se mobilisera pour soutenir une telle initiative de qualité, qui vaut bien mieux que les médiocrités télévisuelles, et qu’il appartient à chacun d’entre nous de soutenir la musique live………Nous sommes repartis en nous disant « Everyday I have the blues »!
Nous allons rêver qu’un jour s’organise une grande nuit du blues au « Zénith de Lille »….. Une nuit autour de musiciens comme Lucky Peterson, Steve Clayton, Little Mike, Cisco Herzhaft… une nuit de rêve.. mais ce n’est qu’un rêve…………………
Vous pouvez retrouver toutes les photos de cette journée sur la page Facebook de Chtijazz.com