Michel Petrucciani restera pour longtemps la référence dans le jazz Français
Je ne sais pas pourquoi….. ou plutôt, si je sais, et je vais vous raconter : A chaque fois que je vais à New-York, je ne peux m’empêcher de penser à lui. A chaque fois que l’avion est à l’approche de l’aéroport de JFK, et que l’on aperçoit les tours de Manhattan, je branche mon MP3 sur Michel Petrucciani et son fameux « Looking Up« . Je vais tenir ce morceau en boucle jusqu’au touché des roues sur la piste. Le même rituel va me prendre en montant en haut de l’Empire State Building.
Nous avons tendance, nous français, à absolument n’avoir de références jazz qu’en regardant de l’autre côté de l’Atlantique.. et je n’échappe pas à cette tendance (mais je tente de me soigner).
Il est né le 28 décembre 1962 à Orange, dans le sud de la France. Avec un nom comme « Petrucciani« , on ne peut être étonné qu’il soit fils d’immigré italien… napolitain . Michel a baigné dans la musique dès sa plus tendre enfance. Son père « Tony » était un imminent guitariste de jazz. Nous retrouverons Antoine ( dit Tony ) Petrucciani dans bon nombre d’albums de Michel. Il faut souligner que le virus musical a aussi atteint les deux frères, puisque Louis est contrebassiste et Philippe guitariste.
Jusque dans les années 70, Michel va vivre à Orange avec ses parents. Antoine Petrucciani tiendra alors un magasin de musique. Il donne également des cours de guitare dans différentes écoles de musique municipale de la région. Michel est atteint de la terrible « maladie des os de verre ». Il est tout de suite passionné par le piano et son père va lui créer des rehausseurs de pédales pour qu’il puisse jouer « normalement ». Sa maladie l’empêchera d’être scolarisé, et c’est par correspondance qu’il recevra des cours. Sa formation musicale va être assurée par son père et Raymonde Jacquemart, professeur de piano. Dès l’âge de 4 ans, il joue du piano…. à 13 ans il accompagne Clark Terry. Clark Terry dira » Il jouait comme un vieux noir désabusé, perdu dans un piano bar quelque part à Mexico ».
Michel Petrucciani souffre énormément et sera victime de nombreuses fractures (y compris pendant ses concerts). En 1981, il part aux U.S.A et enregistre 5 albums avec le batteur Aldo Romano, comme lui d’origine italienne, et qui était carreleur la journée !!!. Je me souviens de photos émouvantes sur lesquelles Aldo Romano portait Michel Petrucciani sur scène jusqu’au piano. C’est en Californie où Petrucciani rencontre Charles Lloyd, saxophoniste très connu dans les années 60, mais qui s’était reconverti dans le business, délaissant la musique. Leur rencontre décide Lloyd à reprendre du service. Ils vont alors se produire ensemble. Michel Petrucciani jouera au fameux « Village Vanguard » de NY et sera le premier artiste « non américain » à signer avec le label « Blue note« , le summum pour un artiste de jazz. 07 ans plus tard, Michel quitte « Blue note » pour le producteur de musique français Francis Dreyfus. En 1990, on retrouve Michel Petrucciani sur bon nombre de scènes mondiales, où il enregistrera certains albums.
Je suis toujours autant stupéfait par sa technique. Les « spécialistes » disent que son jeu est caractérisé par une remarquable indépendance des mains gauche et droite, et une vitesse d’exécution exceptionnelle, due à un entraînement intensif et peut-être à ses grandes mains aux os légers, ce qui permettait à ses doigts de rebondir très vite sur les touches. Moi je n’en sais rien ….je n’ai aucune certitude, je sais qu’il me fait rêver, planer….. il m’emmène dans son univers….et que c’est beau, que c’est bon.
Michel Petrucciani était un séducteur. Il va se marier 5 fois. Chtijazz.com ne veut pas aborder ce que certains décrivent comme le côté « sombre » de cet artiste. Seul l’aspect artistique nous intéresse..le reste appartient à la vie privée. Michael Radford, réalisateur anglais de fiction, fait « son » portrait dans un document retraçant sa vie. Soulignons, information de notre ami bassiste Frédéric Giezek, que Philippe Petrucciani et Nathalie Blanc rendent hommage à Michel dans l’album « Remember Petrucciani » chez Jazz Village.
Michel Petrucciani va nous quitter à l’âge de 36 ans. Il meurt, le 6 janvier 1999, d’une pneumonie à New-York, où il était parti vivre. Je suis très ému d’écrire cet article car les dates de mon départ pour NY et de mon retour coïncident avec ses dates de naissance et de décès. Au moment où vous lirez ces lignes, ce sera pour moi presque un pèlerinage…. A Brooklyn, Harlem, Manhattan, à l’Empire State, ….. rodant au « Coton » ….à « Village Vanguard »…. quelle chance pour moi d’être là où il est allé… avec toujours dans mes oreilles « Looking Up » « Brazilian Like » …ou son « Cantabile », accompagné de mes héros Anthony Jackson et Steve Gadd.
Merci Monsieur ! vous étiez un « GEANT »
Discographie de l’artiste :
- Estate (1982)
- Oracle’s Destiny (1982)
- Toot Sweet (1982)
- 100 Hearts (1983)
- Live at the Village Vanguard (1984)
- Note’n Notes (1984)
- Cold Blues (1985)
- Pianism (1985)
- Power of Three (1986) with Wayne Shorter and Jim Hall
- Michel plays Petrucciani (1987)
- Music (1989)
- The Manhattan Project (1990) with Wayne Shorter, Stanley Clarke, Lenny White, Gil Goldstein and Pete Levin
- Playground (1991)
- Live (1991)
- From the Soul (1991) on December 28, 1991 with Joe Lovano
- Promenade with Duke (1993)
- The Blue Note Years (1993)
- Marvellous (1994)
- Conference De Presse (with Eddy Louiss) (1994)
- Au Theatre Des Champs-Élysées (1994)
- Darn that Dream (1996)
- Flamingo (with Stéphane Grappelli) (1996)
- Both Worlds (1998)
- Live in Germany (1998) and Trio in Tokyo (1999) (with Steve Gadd and Anthony Jackson, recorded in 1997)
- Solo Live (1999)
- Bob Malach & Michel Petrucciani (2000)
- Concerts Inedits/Live (2000)
- Conversation (2001) with Tony Petrucciani